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  • Photo du rédacteurThe English Fairy

Ces préjugés qui m'agacent

Au pays des licornes et des petites fées qui volent (le mien donc), être enseignant c’est bien plus que transmettre un apport théorique dans une matière. C’est aussi servir d’exemple en tant qu’adulte responsable et bienveillant, c’est apprendre aux élèves à évoluer dans la sphère « classe » et « établissement » pour développer des compétences humaines qui (normalement) complètent ce qu’ils apprennent à la maison (raclement de gorge).

Mais finalement, qui nous voit comme ça ? De l’extérieur, est-ce qu’o, sait vraiment ce que ça implique de se confronter à une classe de 4e en pleine puberté ? Car de ce que j’en remarque, même au sein de la confrérie des feignants (oui nous les profs), il y a autant d’avis que de boutons sur la face pubère du pauvre A. de 4eA. Et personnellement, j’ai souvent envie de partager ma vérité à grand coup de dar (ouais je sais je suis une fée mais quand on me cherche je pique).


1° Le métier de prof c’est quoi ?

« Un enseignant1 est une personne chargée de transmettre des connaissances ou méthodes de raisonnement à autrui dans le cadre d'une formation générale ou d'une formation spécifique à une matière, un domaine ou une discipline scolaire. Le terme « enseignant » désigne la personne qui enseigne aux élèves (en primaire et secondaire). »

J’avoue c’est Wikipédia. C’est vrai que dans le fond, c’est ça. On est « chargés » de transmettre un savoir. Le mot n’est-il pas bien choisi ?? « Chargés ». Je trouve que c’est « lourd » de sens (ok je sors…). Notre tâche est quand même assez faramineuse non ? On doit transmettre aux élèves TOUTES les clés pour qu’ils puissent choisir n’importe quel métier ! Alors non, à moi toute seule, pauvre petite prof d’anglais, je ne déplace pas des montagnes, mais si les profs travaillent ensemble, vous voyez un peu quelle équipe on fait ? C’est grâce à NOUS que les pious pious se disent qu’ils veulent faire ingénieur, ou aide-soignante, ou pompier, ou maçon, ou soigneur vétérinaire, ou prof (ahaha, la bonne blague). Si on était pas là, ça donnerait quoi ? J’imagine que ça serait possible, personne n’est irremplaçable, mais donc ça serait aux parents de donner toutes ces connaissances aux gamins ? Franchement, vu la facilité que certains ont à gérer l’autonomie de leur gamin sur les écrans, je suis pas très enthousiaste.

Donc, oui, en tant que prof d’anglais, je suis chargée de transmettre des connaissances culturelles et linguistiques à mes élèves. Je pense cependant que ça ne s’arrête pas là. Je m’explique.

On le connaît tous ce prof qui vient en cours, avec un petit porte documents, un feutre rouge qui marche pas et un feutre vert qui fuit sur tout le bureau. Il fait son cours, connaît à peine le prénom de ses élèves (du coup il les appellent « monsieur » ou « mademoiselle » histoire de conserver sa crédibilité), se plaint assez régulièrement d’à peu près tout, mais sans vraiment mettre les pieds dans le plat. Il se contente de transmettre, de manière descendante (c’est lui qui parle et les élèves se taisent) ce qu’on lui a demandé de transmettre. Perso, j’ai pas trop envie d’assister à son cours, et de toute façon, les connaissances qu’il me donne sont tellement barbantes que je sais pas trop ce que je vais en faire. Ce prof là, vous pouvez être sûrs qu’il concoure dans la catégorie poids plume des « chargés » de transmission de connaissances.

Moi je veux plutôt parler des « poids lourds » de la transmission du savoir. C’est presque la majorité (un peu de bienveillance et d’optimisme, tout comme j’ai appris !). Ces profs qui soit ont un sac à dos bien rempli (avec des feutres de 4 couleurs différentes et la recharge qui va avec) soit qui emmènent carrément leur maison (les feutres de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, avec les recharges et des stickers en plus). Ce sont ces profs qui vont faire attention à la tête de leurs élèves quand ils entrent en cours, qui vont ouvrir la porte et saluer leurs élèves un par un à la fin du cours, qui vont chercher (et souvent trouver) des solutions au cas par cas, qui vont prendre sur leur « temps libre » pour aller travailler avec leurs élèves à l’aide aux devoirs, etc. J’en passe, car la liste est longue. Dans ma courte carrière, j’ai eu l’occasion de rencontrer une belle poignée de ce type de prof là. C’est eux qui m’ont finalement fait comprendre que notre métier ne s’arrête pas juste à la présence devant les élèves pendant 18h (à peu de choses près) par semaine.

Donc oui ça m’énerve de me faire traiter de feignante, quand je songe à tout ce que je donne pour mes élèves. Soyons clairs, je le fais de bon cœur, et je suis épanouie. J’attends pas qu’on me donne un « oh ma pauvre » en me tapotant l’épaule. Mais j’attends pas non plus qu’on m’attaque quand je dis que je suis éreintée après un conseil de classe, ou que les «vacances » ont été courtes. Dans un monde parfait (déjà y’a des licornes et des papillons partout), les non profs seraient capable d’envisager que l’on est pas juste « chargés » comme des mules par les programmes du gouvernement. On aide aussi, et presque SURTOUT les jeunes à passer une étape de leur vie dans les meilleures conditions possibles. #jesuisprofmaisaussilicorne


2° Vous êtes toujours en vacances/Vous êtes payés à rien faire.

ALORS…. Celui-là, B***** de C** ! Je veux dire… F**** !

Tentons de raisonner par les faits. Concrètement, petite fée s’en va au pré toutes les 8 semaines MAXIMUM. Il y a les « vacances » de la Toussaint, les « vacances » de Noël, les « vacances » d’hiver, les « vacances » de printemps, et les fameuses « vacances » d’été.

2 semaines + 2 semaines + 2 semaines + 2 semaines + 8 semaines = 16 semaines de « vacances ». Ca fait 4 mois de « vacances » sur les 12 mois de l’année. Donc celui qui un jour m’a parlé des 6 mois de vacances des profs, déjà… VOILA. Après, je conviens, 4 mois, ça peut paraître beaucoup, comparé aux 5 semaines de congés payés des « pas feignants ».

Ensuite, je pense souvent aux parents qui, au bout de 4 jours de vacances, n’en peuvent plus de leur enfant et de ses revendications de petit troll ronchon. Moi j’ai envie de vous rappeler que dans les faits, on a ce petit troll ronchon là, et 25 autres, 6 à 7h par jour. Oui oui, je SAIS c’est mon métier. Mais comme je l’ai expliqué avant, je suis aussi un être humain (certes doublé d’une fée). Et nous aussi on a besoin de souffler. Pas qu’on ne supporte plus les pious pious, enfin pas que, mais surtout qu’à force d’être sollicités 70 fois en une heure, le cerveau disjoncte. Et si on veut fournir de la qualité aux élèves, je pense sincèrement qu’on a besoin de repos. Et je suis carrément décomplexée de vous le dire là comme ça ! Tout comme les parents ont besoin de mettre les enfants chez papi/mami pour pouvoir s’accorder du temps libre, « sans les enfants ». Nous c’est pareil ! Capici ?!

Mais donc qu’est-ce que je (on) fais de tout ce temps « à rien faire » ? Je prépare mes cours. Bah quoi ? Vous pensiez que j’ouvrais le manuel, photocopiais la page pour la donner aux élèves et abracadabra ?! Si seulement. Refaisons des maths (pour les plus scientifiques et dubitatifs). Une séquence contient en moyenne (chez moi) 7 séances. Pour préparer 1 séance il me faut 3h. Combien de temps je passe sur une séquence ?? Roulement de tambours… 21 HEURES !! Bah ouais !!! Je cherche mes documents, je rédige le déroulé de la séance, je crée mes polycopiés. Ça sort pas des fesses de ma licorne quoi ! J’ai 4 niveaux en collège, une séquence par niveau donc…faites le calcul, je suis trop feignante moi. Je vous vois déjà venir avec vos arguments du type « ouais mais attends, c’est pas en une fois, et pis t’as les vacances ». Bah… si je travaille pendant les vacances c’est plus des vacances non.. ? Faut savoir.

J’admets qu’être organisée est un plus. Je prends sur mes week-ends (et donc mes moments avec Mister Fairy) pour anticiper et prévoir de pouvoir profiter des soirées pour regarder des bêtises à la TV (tout en corrigeant les chefs d’œuvres des élèves, parce-que quand même, une semaine sans travail hors enseignement, c’est pas possible).

Je vais pas vous sortir l’argument à deux balles du type « le concours est ouvert et accessible, si c’est si attirant, allez-y ». J’ai juste envie que les gens puissent relativiser sur ce temps qui nous est alloué chaque année. Oui on se repose et on virevolte avec nos petites ailes pailletées de temps en temps, mais on travaille aussi beaucoup pour offrir du contenu potable.


3° Vous êtes surpayés pour le peu de boulot que vous faites

Dans la lignée du « payés à rien faire », le surplus de salaire. J’avoue que je suis souvent démunie face à ce genre de remarque. Ma petite aura féérique me quitte et je me terre dans mon silence.

En vrai, si on parle du ratio travail en présentiel/salaire, oui on a un revenu conséquent. Malheureusement, ça ne s’arrête pas là. J’ai fait des jolis calculs un peu plus haut pour vous aider à comprendre. Je reprends. Si je compte mes 18h et mes 15h approximatives de travail préparatoire, j’arrive à 33h/semaine. J’ai souvent 3 à 4 paquets de copies à corriger en plus. Je n’ai pas de donnée fixe, car chaque production est différente. Disons que ce ne sont pas des expressions écrites à 30 minutes par copie. Je prends 1h30 par paquet. J’arrive à environ 38h par semaine au total. J’ai envie d’ajouter le temps que je passe à remplir mon cahier de texte (qui ne se remplit toujours pas tout seul, malgré les tonneaux de poussière de fée que je déploie). 30 minutes par jour. Je monte à 40h. Je continue ou je m’arrête ?

En y réfléchissant avec ma mentalité de bisounours bienveillante, je me suis dit « bof, c’est à peu près la durée de travail hebdomadaire normale non 40h ?». Et mon salaire (dénué de toutes ses primes) semble en adéquation avec ma quantité de travail. Je veux dire, j’ai pas fait un doctorat (pas encore), j’ai pas 30 ans d’expérience (pas encore) et j’ai même pas un diplôme d’enseignement (puisque j’ai fait de la recherche avant de me décider de passer le concours en candidat libre).

Mais y’a les primes, parlons-en. Je suis en REP+ et je suis PP. Donc on peut ajouter plusieurs centaines d’euros. Finalement ça va non ? Et là ça me frappe. Comme si j’avais reçu la pomme de la méchante sorcière en pleine tronche. Je vois passer ma collègue préférée dans le couloir. On a sensiblement le même âge, le même échelon et les mêmes primes. SAUF QUE, elle a deux enfants et est propriétaire d’une maison pour loger tout ce petit monde. La différence c’est que moi je m’en sors, en faisant attention. Mais elle ? Bah elle galère.

Donc je dirais presque que oui, on est pas si mal payés. On travaille, on a un salaire, qui varie en fonction de tout un tas de données.

Mais le mode de vie « enseignant » ne convient pas à tout le monde. Ou alors, tu dois planifier ta vie autour de ton évolution, pour que ton changement d’échelon coïncide avec ton projet achat ou bébé. SUPER… Oui c’est sûr tu as du temps « libre » pour aller chercher tes enfants à l’école, mais du coup tu vas pas les emmener faire un tour de manège tous les mercredis.

Finalement c’est ça qui moi m’interpelle dans ce débat salarial. Les petits jeunes se débrouillent pas trop mal, tant qu’ils sont célibataires ou en concubinage sans enfants. De toute façon on le sait, dès qu’il y a des mioches, c’est chiant (mouahaha).


C’est pas grave les amis, au fond, on aime bien se disputer avec tout le monde pour montrer à quel point on est passionés. Kiffez votre life,

Poussière de fée,

The English Fairy

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