BILAN - Mon 1er trimestre en REP+
- The English Fairy
- 2 janv. 2019
- 3 min de lecture

JUIN
- Alors alors?!!! Tu vas où ??
- Bah... en REP+, à 1h30 de chez moi.
- Oh la la, tu vas voir, la REP+!
Ah bon? C'est si terrible que ça la REP+? Mais non, il doit forcément y avoir un moyen de s'épanouir. Si si, je suis sûre. Mettons toutes les chances de notre côté.
TO DO LIST JUILLET
- déménager (bah oui, 1h30 de voiture sans bouchons, c'est moyen)
- préparer des séquences (autant être prévoyante, et arrivée parée à toute éventualité)
- dormir (on sait jamais)
- discuter avec des collègues (l'entraide c'est primordial)
PRE-RENTREE 31 AOUT:
- déménagement: OK (quoique fatiguant)
- préparation de séquences: OK (après des heures de réflexion, j'ai au moins une séquence par niveau, avec des objectifs simples mais stimulants).
- dormir: euh....JOKER
- discuter avec des collègues: euh... JOKER (bah oui, les profs c'est tout le temps en vacances, du coup ça travaille jamais).
J'ai donc entamé ma 3ème année d'enseignement, sur un nouveau poste fixe, dans un établissement "difficile". Jusque là, entre mon année de stage et mes premières années, j'ai été plutôt gâtée par le rectorat (si si, c'est possible). Un premier poste en lycée, puis un collège calme, somme toute, un "bon" début de carrière.
Et là, patatra. L'affectation que l'on redoute tous (ou pas). Celle que tu justifies par "bah oui mais tu sais je suis en début de carrière, j'ai pas de points" dans les repas de famille (forcément quand t'es prof t'as le temps de t'ennuyer le dimanche). Je suis pas spécialement effrayée, finalement ce sont des adolescents comme les autres qui m'attendent. Je ne sais simplement pas à quoi m'attendre. On m'a tellement parlé de la REP+: "Oh la la tu vas voir, dans ces établissements là, les équipes sont hyper soudées" / "Oh la la tu vas voir, les élèves sont hyper remuants" / "Oh la la tu vas voir, il faut que tiennes sans lâcher les 3 premiers mois, et après ils te suivront au bout du monde".
Ouais... bah oh la la, que du blablabla tout ça. Que nenni. J'avais tellement d'idées préconçues, auxquelles j'admets avoir adhéré par défaut, que la claque en a été d'autant plus violente.
Déjà, les élèves m'ont accueillis à bras ouverts. Certes, ils ont beaucoup d'énergie. Certes, ils ont moins de codes sociaux. Certes, le niveau est différent. Mais moi ce que je vois, ce sont des ados comme les autres, avec des préoccupations personnelles presque comme les miennes, moi l'adulte.
Ensuite, le contact avec l'équipe pédagogique n'est pas forcément évident. Entre les collègues condescendants qui pensent devoir tout t'expliquer parce-que tu es "une jeune prof", ceux qui sont là depuis longtemps et qui se prennent pour les lions de la jungle, ou encore ceux qui sont tellement blasés qu'ils ne te voient pas. Mais j'ai envie de dire, on pourrait avoir cette description dans n'importe quel établissement.
Et enfin, au bout de trois mois, je dirais que certes, les premiers cours ont été décisifs dans ma gestion de classe, mais je peux affirmer que ce n'est surtout pas maintenant que je dois lâcher. Ma pratique ressemble un peu à une exploration de la forêt amazonienne, durant laquelle tu peux te faire gober à tout moment par un jaguar.
Mais le plus dur, et c'est là que ça se corse, c'est l'adaptation de mes contenus pédagogiques au niveau de mes élèves. Attention, soyons clairs, rien à voir avec le prof blasé qui va dire "oh la la, je te jure je peux rien en faire, ils sont nuls". NON! Ma détresse vient plutôt du fait que je ne trouve pas les moyens de les raccrocher au wagon. Et pourtant, c'est pas faute de plastifier, découper, buzzer, coller, sticker... Mister Fairy est devenu un professionnel de la plastifieuse, j'ai investit dans un massicot, et j'ai une playlist "ESL games" sur YouTube. Les gars, JE SUIS AU TAQUET! Mais ça ne semble pas suffire. Disons que 70% de mes élèves ne montrent pas de signe d'investissement quelconque. Leur niveau n'évolue pas, et reste en A1 (utilisateur débutant pour les non initiés). Ils n'en restent pas moins souriants et gentils. On s'adore, mais on lutte, ensemble.
Alors, qu'est-ce qu'on fait? D'accord, ils ont du mal, mais pas que en anglais. D'accord, ils ont des difficultés personnelles. D'accord, il faut adapter. Je suis ok avec tout ça.
Je suis motivée (pas comme eux) mais découragée (comme eux). Est-ce que ça veut dire que je dois revoir mes exigences à la baisse? Est-ce que je dois trouver des contenus différents?
J'ai pas envie de changer mes apports pédagogiques et d'abaisser mes objectifs sous prétexte que... je veux rester ambitieuse pour eux, et pour moi!
Ainsi,
bilan mitigé pour ce premier trimestre en REP+. Des émotions très positives en début d'année, des élèves accueillants et disposés à apprendre (un peu). Et une fin de trimestre catastrophique, avec des élèves (et une prof) fatigués et découragés (beaucoup).
Ce n'était que la première bataille, la guerre n'est pas finie.
Poussière de fée,
The English Fairy
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