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  • Photo du rédacteurThe English Fairy

Les élèves à "besoins éducatifs particuliers"

Dernière mise à jour : 2 oct. 2019

L’une des richesses de l’enseignement selon moi c’est de travailler avec de l’humain. C’est un peu ce qui nous permet de ne jamais s’ennuyer : devoir composer avec la diversité des profils de nos petits trolls. Parfois, au-delà de la « simple » lacune dans telle ou telle matière, nous rencontrons des petits trolls qui nécessitent un aménagement très individualisé. Notre rôle change donc d’enseignant de classe à professeur particulier. Mais tout en continuant à faire cours au reste du groupe. Sympathique non ? Alors qui sont ces élèves « différents » (mais finalement pas tant ça) ? Comment les accueillir ? Qu’est-ce qui marche pour moi ? Follow the fairy dust…


QUI ?

Définir les « élèves à besoins particuliers » peut s’avérer un peu technique je trouve, et je ne maîtrise pas tous les codes et autres acronymes. En revanche, voici une liste non exhaustive des divers profils que j’ai pu rencontrer dans ma carrière de petite fée.


- Les « DYS » : ce sont des élèves aux pathologies diverses, dont l’intitulé commence souvent par « dys » : dysorthographie ou dysgraphie (difficultés dans l’expression écrite), dyslexie (difficultés dans la lecture), dyspraxie (difficultés motrices).

- Les ULIS (Unité Localisé pour l’Inclusion Scolaire) : troubles des fonctions cognitives ou mentales, des troubles spécifiques du langage et des apprentissages, troubles envahissants du développement (dont l'autisme), troubles des fonctions motrices, troubles de la fonction auditive, troubles de la fonction visuelle ou troubles multiples associés (pluri-handicap ou maladies invalidantes)

- Les UPE2A (Unité Pédagogique pour Élève Allophones Arrivants) ou les EANA (Élèves Allophones Nouvellement Arrivés): élèves dont la langue maternelle n’est pas le français.

- Les élèves intellectuellement précoces

- Élèves à pathologies lourdes invalidantes

- Élèves en situation familiale ou sociale dégradée


La liste n’est pas exhaustive je le répète mais reprend dans les grandes lignes la variété des élèves qu’on appelle donc « à besoins particuliers », car leurs diverses difficultés requièrent une adaptation de notre pédagogie. Ce sont donc des élèves que l’on peut croiser dans nos cours, et pour lesquels nous sommes censés différencier notre contenu pédagogique, sans pour autant leur faire cours de manière individuelle.


Où les trouver ?

Ces élèves sont donc inclus dans la sphère de l’établissement, que ce soit dans une salle en particulier avec un emploi du temps et un enseignant propre, soit directement dans nos cours. Pour quelques dispositifs, ils ont un un fonctionnement à part avec un enseignant qui est formé pour les accueillir (dans le meilleur des mondes). Pour les ULIS par exemple, ils sont dans une salle « ensemble » (tous niveaux confondus) avec un professeur des écoles spécialisé. Ils peuvent, selon cas particulier et décision commune (dans le meilleur des mondes) de l’équipe enseignante, être « inclus » dans certains cours. Qu’ils soient donc dans une salle à eux ou dans nos cours, nous sommes de toute façon amenés à interagir avec eux.


Est-ce qu’on sait ?

Question intéressante. Pour les ULIS, oui c’est évident, la plupart du temps. D’autant plus s’ils ne viennent pas à tous les cours. Pour les autres, c’est un peu plus compliqué. En tout cas, dans mon expérience, je n’ai pas toujours été au courant malheureusement. Il m’est arrivé d’avoir deux ou trois élèves où je percevais des difficultés, mais sans vraiment comprendre. Souvent c’est comme ça que ça se passe : on voit bien qu’il y a quelque chose de compliqué dans l’apprentissage, mais quoi ? On essaye de discuter avec le professeur principal (quand ce n’est pas nous), mais là encore, l’enseignant n’est pas toujours au courant. On doit parfois se diriger vers les CPE, le secrétariat, et même le chef d’établissement pour aller chercher des informations. On apprend alors des choses surprenantes : l’élève était en UPE2A mais s’est retrouvé en classe « classique », mais « on sait pas pourquoi ». Ou encore l’élève a des troubles de l’hyperactivité et a un traitement lourd, c’est pour ça qu’il s’endort dans votre cours. Bref, la transmission d’informations n’est pas toujours très efficace, et retarde la prise en charge différenciée de notre part.

Ce qui peut déclencher la différenciation, c’est recevoir un mail incendiaire de l’infirmière scolaire en janvier, qui nous « rappelle gentiment que untel, untel et untel nécessitent des accompagnements particuliers, et qu’il faut faire le nécessaire au plus vite ». AH BON ?! Bah il était temps d’avoir la liste de tous ces élèves pour lesquels je dois faire quelque chose de différent. Cette année donc, j’ai appris en janvier que dans chacune de mes 5 classes, 40 à 60% de mes élèves avaient des dispositifs de prise en charge particuliers.


Comment ils sont pris en charge ces élèves ?

Le flou le plus total… Enfin pour moi. J’ai connaissance des systèmes qui existent. D’autres acronymes tout aussi charmants. PPRE (Programme Personnalisé de Réussite Educative), PAI (Programme d’Accompagnement Individualisé), PAP (Plan d’Accompagnement Personnalisé), PPS (Projet Personnalisé de Scolarisation). Ils sont mignons aussi ceux-là hein ? Concrètement, ils servent à poser sur le papier que l’élève est en situation d’apprentissage difficile et qu’il faut mettre en place telle ou telle méthode pour l’aider dans sa progression. La différence entre chacun d’entre eux ? Bonne question. Il y a cet espèce de sous-entendu parmi la communauté éducative que tout le monde est censé savoir ce que ça veut dire et comment on les utilise. Personnellement, on ne m’a jamais décrit aucun d’entre eux, donc j’ai appris sur le tas. J’ai été confrontée au PPRE seulement, mais jamais en tant que professeur principal. J’ai eu la « chance » de suivre les indications d’un enseignant qui connaissait un peu le schmilblick.

Deuxième possibilité de prise en charge : le freestyle. Oui, c’est totalement possible qu’on vous mette un élève à besoins particuliers en vous disant « fais de la différenciation », sans que vous n’ayez reçu de formation pour ça, EVER ! Mais ils sont là, et on est bien obligés de faire avec. D’autant plus qu’ils n’ont rien demandé eux. Surtout pas à nous faire galérer.

Vous l’aurez donc compris, si le chef d’établissement a décidé, l’élève sera pris en charge, d’une manière ou d’une autre.


Comment on adapte son contenu pédagogique ? Est-ce que c’est possible ?

A part une matinée de cours magistral sur le sujet « Les élèves à besoins particuliers, kesako ? », je n’ai jamais reçu de formation sur le sujet. Malheureusement. Parfois je me sens un peu comme un cuisinier débutant à qui l’on met une poêle brûlante dans les mains en disant « débrouille-toi ». L’effet immédiat c’est que ça fait mal, à la fois à moi puisque je me brûle, et à la poêle, puisque je la laisse tomber par terre. Pour les élèves à besoins particuliers c’est pareil. Le premier contact est souvent difficile car on ne sait pas vraiment comment interagir avec. Personnellement, je n’ai jamais vraiment envie de dire clairement « alors puisque toi tu es autiste, je vais te donner un polycopié différent ». Ou alors, quand il m’est arrivé de tenter une approche curieuse du style « qu’est-ce que je peux faire pour toi ? », l’élève s’est braqué et impossible de le faire travailler pendant 3 semaines.


Les polycopiés justement, parlons-en. Le but c’est de faciliter l’apprentissage et d’aider à la concentration. Donc, ce que je peux dire de mon expérience :

- On évite toutes les petites décorations de partout (même quand on est une petite fée trop choupi)

- On AERE au maximum la présentation

- On STRUCTURE le document (avec des titres lisibles et simplifiés)

- On utilise une police simple de lecture (la plus connue étant OpenDyslexic).

Ça c’est pour la présentation générale, pour la forme.


Après avoir testé plusieurs choses, j’en suis venue à la conclusion qu’il fallait aussi changer le fond. J’ai vraiment essayé de voir s’ils pouvaient faire les mêmes « exercices » que les autres. Désolée, mea culpa, mais sans formation, on fait ce qu’on peut. Donc, je sais que ça ne marche pas. Voici ce que j’ai mis en place, avec succès, selon les profils :

- Mettre des couleurs pour les aider à catégoriser (dans les phrases, pour les différentes catégories de mots)

- Des schémas (notamment pour les points de grammaire)

- Des tableaux (qu’ils peuvent remplir, en utilisant les couleurs par exemple)

- Les tablettes pour qu’ils puissent s’enregistrer, après avoir inventé des chansons/des poèmes/des histoires. Ou tout simplement pour qu’ils lisent à haute voix.

- Une « BE OK BOX » avec des petites boules anti-stress et autres petits objets qu’ils peuvent manipuler en même temps qu’ils travaillent.

- Des découpages. Ils peuvent découper puis assembler diverses choses (selon le but).


Entre le fond et la forme, je m’en sors pas trop trop mal, et les petits trolls qui ont besoin de choses différentes semblent apprécier. Les concernés savent qu’ils ont des options et ils en profitent quand ils veulent. Rien d’obligatoire, mais ils savent qu’ils doivent aussi remplir leur part du contrat. Je les aide parce qu’ ils en ont besoin, mais je ne fais pas le travail pour eux. Et finalement, c’est comme ça que je les rattache à la classe : en leur donnant des objectifs à remplir, qui parfois ne sont pas très loin des élèves les plus en difficulté.

Je dirais que ce qui a marché pour moi, quand j’avais l’information bien évidemment, c’est de proposer une différenciation discrètement, sans le notifier devant toute la classe, mais en envoyant un petit sourire au concerné. Si c’est un élève qui distribue les polycopiés pour moi, je vais quand même donner le différent moi-même. Certains s’en rendent compte car ils sont attentifs mais bienveillants, et les autres sont trop occupés à demander de la colle à l’autre bout de la salle. Ça a toujours fonctionné jusque-là, donc je continue. Et à force de différencier, tout le monde fonctionne comme si c’était évident.


Ce que je pense de la situation et de l’école

« inclusive »

ALORS, oui je mets des trucs en place, oui ça marche la plupart du temps, et oui je suis assez satisfaite de mon travail. Par contre, NON, je suis pas satisfaite de la situation. Il paraît que l’école aujourd’hui en France est une école « inclusive » de tous les profils d’élèves. BAH NON. Pour moi, on pourra dire être inclusif le jour où tous les enseignants seront formés et aptes à recevoir tous types d’élèves dans leur classe. Je trouve cela inacceptable que la situation soit douloureuse pour tout le monde. Les élèves en question ne savent pas où se mettre ni comment se positionner par rapport aux autres, et les enseignants ne savent pas non plus comment les y aider. Du moment que ça n’est pas fluide, c’est que ça n’est pas normal.

Les différents acteurs de la situation ne fonctionnent pas encore ensemble. Les parents (je vous kiffe hein le plus souvent, sauf là) ne transmettent pas les différents dossiers de prise en charge à l’infirmière scolaire en temps et en heure. L’infirmière scolaire ne transmet pas les informations à l’administration et aux enseignants. Etc. Finalement, on en revient TOUJOURS à un problème de communication, qui enclenche un cercle vicieux.

D’autre part, je voudrais quand même parler des infrastructures scolaires aujourd’hui. Je trouve cela assez hypocrite de dire qu’on peut inclure tous les élèves dans le système. Pour le coup je tiens à saluer le travail de mes collègues en dispositif ULIS. Je trouve que c’est un système qui prend en compte la difficulté des élèves. Et qui leur donne une chance d’être inclus dans des classes de temps à autres, sans leur mettre la pression de réussite. Je suis désolée, objectivement, si tout le monde est dans la même classe, c’est difficile d’offrir les mêmes chances de réussite à un élève autiste et à un élève lambda. Attention, je dis pas « ils n’en sont pas capables », PAS DU TOUT. Je dis juste « le système n’est pas adapté ». On nous demande de fonctionner par compétences, dans une matière ou une autre. Mais ce sont des compétences intellectuelles ! Les élèves à besoins particuliers en sont encore à l’acquisition de compétences motrices ou même sociales. Leur ajouter tout le reste en plus ça me semble tellement lourd. Ça demande d’être formé en amont, et de leur accorder beaucoup de temps pendant le cours. Ça crée finalement plus de déséquilibres plus qu’une égalité d’inclusion. Ce n’est confortable pour personne, et tout le monde râle.

C’est pas pour autant qu’on doit abandonner, c’est un beau projet. Mais il faut y mettre des moyens et du temps. Pas vraiment la politique actuelle il semblerait…


Poussière de fée et accompagnement,

The English Fairy

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