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  • Photo du rédacteurThe English Fairy

Ces trucs que je suis censée faire..mais je galère!

« Les élèves entrent en classe et vous saluent en anglais, le Teacher’s Assistant se charge du début du cours, toujours en anglais. Pendant le cours, les élèves perdus lèvent la main pour demander des explications, en anglais, et les élèves qui suivent leur répondent, oui, toujours en anglais. Les élèves sont impliqués et appliqués, et ils interagissent en anglais, car le contenu pédagogique proposé les engage dans leur apprentissages ».

Quand on m’a décrit un cours d’anglais comme ça la première fois à l’ESPE, je me suis dit deux choses :

- Wahou ça a l’air trop bien ! Je peux venir ?!

- Euh… attends ça existe ça t’es sûr ?

Et puis j’ai rencontré des gens qui m’ont aussi décrit ce genre de cours « parfait », où ils arrivent à parler QUE en anglais et les élèves comprennent au moins 70% de ce qu’ils racontent ; où ils ne font pas de grammaire à proprement parlé car les élèves comprennent d’eux-mêmes comment manipuler les structures rien qu’en les observant en contexte ; où chaque cours est scénarisé et les élèves sont tellement embarqués qu’ils ne posent pas de questions du style « Mais Madame on va vraiment autopsier un cadavre? ».

Bref, un cours d’anglais tellement génial décrit comme ça qu’il te fait complexer à mort. Enfin moi perso je suis pas « au point » dans toutes mes pratiques pédagogiques.

J’ai souvent la sensation qu’on attend de nous de faire tous ces trucs qu’on nous apprend on formation, ces trucs qu’on nous vend comme « incontournables » ou « vraiment simples ». Bah désolée, même au monde des licornes, la reine fée galère…


Le tout anglais

En tant qu’enseignante en langue vivante, ma mission est d’exposer les élèves à la langue cible le plus possible. On nous demande même de ne parler QUE en anglais. Aucun mot français ne doit sortir de notre bouche. Même quand on fait des remontrances, ça doit se faire en anglais. Finalement, le mot d’ordre, c’est l’AN-GLAIS.

Sur le principe, je suis entièrement d’accord. Ce n’est pas en sachant qu’ils peuvent avoir recours au français quand ils veulent que les élèves vont faire un effort. Dans la pratique ? Euh… buls**** ?!

Sérieusement, pour moi c’est compliqué. J’ai beau saupoudrer mes élèves avec ma poudre « bienveillance magique », et parler le plus lentement possible, en articulant, presque même en effaçant mon accent américain (celui-là même pour lequel je me suis fait tapée sur les doigts en formation), et bien mes élèves ont toujours énormément de mal à comprendre ce qui se passe 60% du temps.

Lorsque j’étais dans un environnement « classique », c’est-à-dire pas REP+, cette pratique pédagogique était bien plus envisageable et je me sentais moins mal à l’aise de mettre mes élèves en difficulté le temps qu’ils comprennent ce qui se passe.

Désormais, j’évolue dans un environnement où la langue maternelle n’est pas le français, et les élèves sont avant tout en apprentissage du français. L’anglais arrive donc comme un cheveux sur la soupe.

Je suis censée pratiquer le tout anglais. Oui d’accord. Mais d’un point de vue pratique, même lorsque je me prends par la main et que je me « force » (j’insiste sur le côté désagréable de la démarche), je dois accompagner mes explications de nombreux mimes, de synonymes en anglais, que je dois souvent dessiner au tableau. En gros, j’ai plutôt l’air d’un gorille qui tente de communiquer. Le temps de faire tout ça, j’ai perdu 10 minutes de mon cours à conserver l’anglais et à lutter contre le français.

Je ne dis pas « le tout anglais est impossible ». Quoique, dans certains milieux éducatifs, je commence à vraiment me poser la question. Je dis simplement qu’il serait peut-être temps d’arrêter de diaboliser le français dans les cours de langues. Mes élèves commencent tout juste à avoir le réflexe de parler anglais avec moi. Entre eux, ça ne leur vient pas à l’esprit. Est-ce que ça veut dire que je ne fais pas correctement mon métier ? Est-ce que ça veut dire que mes élèves ne font pas ce qu’ils sont censés faire ? J’ai l’impression qu’on nous culpabilise beaucoup par rapport à cet aspect de notre pratique (entre autres).

Moi j’ai juste envie de vous dire, toute petite fée que je suis, TAKE IT EASY. Je suis sûre que vous faites le maximum pour exposer vos élèves à l’anglais, et qu’ils apprennent tous des trucs supers.

Finalement je pense que le tout anglais est probablement possible dans les établissements à grande mixité sociale, où les élèves sont exposés à l’anglais ailleurs qu’en classe, avec leurs parents. Mais dans des établissements comme le mien ? Sorry dude, not gonna happen !


Ne pas faire de leçon de grammaire

ALORS… je sais pas trop si je touche à un sujet épineux, mais faut quand même qu’on en parle non ? Déjà j’ai jamais tout compris ce qu’il fallait qu’on fasse et ce qu’il ne fallait PAS qu’on fasse. Leçon de grammaire, pas leçon de grammaire. I am at a loss !

Du coup, en fouillant un peu dans mes cours d’ESPE (oui oui toujours les mêmes), j’ai juste trouvé une petite phrase qui expliquait qu’on doit montrer comment on utilise les structures « en contexte ». Mais finalement, j’ai jamais été formée à comment transmettre la grammaire. Du coup je brode un peu avec ce que j’ai observé en stage, avec ce que j’ai lu à droite à gauche. Je me souviens du « point de réflexion sur la langue » (ou PRL) que je vois souvent apparaître dans les préparations de séquences de collègues (ceux qui veulent bien partager).

S’ils le font, c’est que c’est bien non ? EH BAH NON ! Dernière visite de l’inspection (sous forme de chargé de mission) : « Mais par contre la leçon de grammaire est à proscrire en tant que telle. Déjà vous repassez au français, et ça ne les aide pas que ça soit seulement de la théorie. Il leur faut de la PRA-TIQUE ». Ah… d’accord. Donc concrètement je peux aller monter ma licorne sans avoir appris comment diriger le harnais ? Juste de la PRA-TIQUE ? Bien que je sois bonne élève et vraiment pas disposée à remettre en question la bonne parole de ma hiérarchie, moi ça me parle pas là comme ça.

Comment les élèves sont ils censés déduire que : « He wanted to love her » = base verbale WANT à laquelle j’ai ajouté la marque du prétérit -ED = temps du passé faisant référence à une action révolue. WTF ??!! Déjà qu’ils ont du mal à déduire que January the 1st c’est le 1er janvier… --‘

Pour conclure, j’ai du mal à envisager mes objectifs grammaticaux sans la leçon qui va avec. Et d’ailleurs, je trouve qu’ils sont vachement plus réceptifs à la langue depuis qu’on dissèque les structures ensemble. Dans leurs cahiers, ils ont des formules qui ressemblent presque à des formules de physique (oui parce-que je suis pas une fée sectaire d’abord).

S + BV + -ED + CPT. Au tableau ils ont des petits bacs avec soit des sujets, soit des verbes, soit des compléments, et ils doivent aller piocher pour faire la phrase complète, en ajoutant -ED, ou toute autre terminaison adaptée. Du coup ils manipulent (au sens propre comme au figuré) et ils ont de meilleurs résultats car ils se souviennent de la manipulation physique de la structure. Je joue donc sur leur mémoire kinesthésique* (attention, fée intello est dans la place).

*mémoire qui joue sur le souvenir de la sensation physique liée à un mouvement. Ex : je m’en souviens car à ce moment là j’étais en train de brosser ma licorne.

Est-ce que je fais bien ? Est-ce que je fais mal ? Je dirais que d’un point de vue inspection, je ne suis pas toujours dans les clous, mais j’assume et je tente de déculpabiliser en observant l’attitude positive de mes élèves face à la grammaire. Ils ne sont pas tout crispés de devoir tout trouver eux-mêmes et apprécient d’être un tant soit peu guidés dans le processus. Le tout saupoudré d’une jolie poussière de fée et ils n’y voient que du feu !


La "scénarisation" des séquences

Dernier point un peu particulier, puisque je dirais que sur l’échelle de réussite, j’en suis à peu près à la moitié. Pour les non -initiés, la "scénarisation" qu’est-ce que c’est ? Rien ne vaut un exemple concret. Au lieu de dire « Nous allons travailler sur la ville de Londres à travers l’expérience de l’ours Paddington », il faut "scénariser" et dire « L’ours Paddington nous a envoyé une lettre depuis le Pérou. Il souhaite visiter la ville de Londres. Préparez un programme de visites que nous allons lui

proposer ».

Vous voyez l’idée ? Le but est de rendre la situation d’enseignement plus concrète pour les élèves. Nous ne sommes plus seulement en cours d’anglais, mais dans une véritable situation où quelqu’un a besoin de nous.

Pourquoi c’est intéressant ? Je dirais que ça a le mérite de raccrocher au wagon à peu près tous les trolls dissidents. Ça implique les élèves car ils ont une mission, quelque chose à faire. En bref, ça les rend acteurs du cours, au lieu d’être tout simplement passifs et de s’ennuyer comme des rats morts.

Dans la pratique, ce n’est pas toujours aussi évident, pour moi en tout cas. Et ce, dans tous les environnements où j’ai évolué en tant qu’enseignante. Ça ne tient pas seulement de la REP+. Ce qui se passe c’est que les élèves ne « rentrent pas dans le jeu ». La première réaction c’est de demander au prof si c’est vraiment réel, si on va vraiment aller à tel endroit, si untel va vraiment venir dans la classe, en gros s’il y a vraiment un monstre dans le placard quoi. Finalement je joue tellement le jeu que les élèves ont une étincelle dans les yeux, comme si le Père Noël existait vraiment, avant de s’entendre dire « mais non c’est le cadre du cours enfin ». Et là, patatra.

Je contextualise à nouveau. En 4ème, j’entame ma séquence sur le road-trip. Je distribue la fiche séquence qu’on lit ensemble. La SEULE et UNIQUE question à la fin de la lecture c’est « Mais Madame, on va vraiment aller aux États-Unis ? ». Qu’est-ce que je réponds dans ces cas-là ? Je dois "scénariser", rendre le truc réel pour les intéresser… Oui mais bon, je ne vais pas les emmener aux États-Unis, enfin pas réellement. Seulement virtuellement.

Et c’est LA que se fait toute la différence selon moi. Les élèves ne semblent pas se contenter du « virtuel » pour s’impliquer dans quelque chose. C’est bien mignon de leur dire « oui oui vous allez voyager comme avec un casque de réalité virtuelle ». Ils s’en moquent eux du virtuel. Ils veulent sortir de leur quotidien, voir d’autres horizons, rencontrer d’autres cultures… Pardon je m’emballe. Mais vous voyez ? J’ai mis du temps et de l’énergie à créer une séquence qui soit ancrée dans le réel, pour qu’ils puissent voir autre chose. Mais ils sont déçus de voir que ça reste purement et simplement Miss Fairy qui part dans ses délires…

Petit espoir naissant : dernièrement j’ai mis le paquet sur la décoration et les effets visuels et sonores lors d’une séance. ET CA MARCHE !! Je les ai mis en scène dans un décor d’aéroport (toujours mes 4èmes blasés) où ils partaient pour les États-Unis. Bande son à l’appui, ils s’y sont crus.

Seule difficulté, j’ai les 4 niveaux du collège, et je me vois mal changer les décors de ma salle en 5 minutes entre deux cours pour convenir à chacun des thèmes de mes séquences. Bah oui, passer de Londres à New-York, ça se fait pas en 5 minutes, on mélange pas les serviettes et les torchons !


Finalement, ces difficultés qui parfois prennent un peu le dessus sur ma pratique me permettent aussi de me rendre compte que notre métier est riche. Riche en remise en question, riche en développement personnel et professionnel, mais riche de pratiques, qui sont tout aussi diverses que la variété de fées dans le pays des licornes.

DONC, oui, je ne suis pas toujours dans les clous mais non, je n’abandonne pas de voir s’allumer la lumière dans le regard de mes élèves lorsqu’ils auront échangé sur le prétérit en anglais dans un décor de Star Wars.

Stay strong,

Poussière de fée,

The English Fairy

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